Homélie de Philippe Moreel , diacre

L'homélie est téléchargeable en bas de page.

Chers fiancés, Chers frères et sœurs en Christ,

Nous voici donc dans la traversée du désert qui nous amène vers Pâques. Nous voici dans le désert traversé par le peuple hébreu lors de son exode qui l’a mené de l’esclavage de l’Egypte à sa libération dans la Terre promise. Et d’une certaine façon, le désert est le lieu des fiançailles de Dieu avec son peuple. Le peuple hébreu y a découvert combien Dieu l’aimait et le protégeait.

Aujourd’hui, le Père s’adresse à nous en nous intimant l’ordre d’écouter son Fils, celui qu’il a choisi. C’est le mystère de la Transfiguration. Vous l’avez entendu : le Christ appelle avec lui les trois disciples Pierre, Jacques et Jean. Les trois disciples sont invités à partager l’intimité de la Trinité, en contemplant la présence du Dieu trinitaire dans le corps du Christ. Et nous-mêmes sommes donc invités à notre tour à cette contemplation.

Mais attention, cette vision n’est pas une série sur internet ou la télévision, ni une belle histoire réservée à Jésus et aux trois disciples. La fascination de cette vision risque de nous arrêter. Nous voudrions rester à voir le Christ, le Père nous invite à l’entendre. Et pourtant, le Christ ne dit rien ! Comment écouter ce fils bien-aimé ?

En ce début de Carême, nous sommes invités à nous retirer au plus profond de nos maisons pour prier. Qu’y a-t-il de plus profond finalement que notre cœur, lieu de notre rencontre intime avec le Christ ?

Aujourd’hui avec les apôtres nous sommes invités à écouter ce qui est en nous depuis notre baptême, et qui sommeille souvent et travaille en nous comme une chrysalide qui se transforme au fil du temps. Nous sommes invités à écouter le Christ, présent en nous, et qui nous redit son amour. Nous sommes invités à écouter le Christ qui nous appelle et vers qui nous devons nous retourner. Laissons le Christ vivre en nous. Laissons-le nous mener au bonheur, avec confiance. Alors, son visage lumineux pourra nous illuminer à notre tour.

Chers couples de fiancés, regardez votre bien aimé(e) mais regardez-le ou regardez-la avec les yeux du cœur avec un regard qui relève et qui réchauffe. Frères et sœurs de notre communauté paroissiale regardez comme ils sont beaux ces couples de fiancés, voyez comment ces amoureux se regardent : chacun éprouve de la joie à faire naître sur le visage de l’autre un sourire. Le visage de l’autre s’illumine au contact d’un regard transfiguré donc plein d’amour. Contemplons donc cet Amour véritable liant le Père à son Fils. Chrétien transfiguré, sur ton visage l’amour de Dieu est affiché. Tu es heureux, montre-le !

La Genèse nous apprend que Dieu créa l’homme à son image, homme et femme. Comme le dit si bien le Pape François, « l’image de Dieu est un couple marié : l’homme et la femme ; pas seulement l’homme, pas seulement la femme. Mais tous les deux. C’est l’image de Dieu : l’amour, l’alliance de Dieu avec nous est représentée dans cette alliance entre l’homme et la femme. Et ceci est très beau ! Nous sommes créés pour aimer, comme reflet de Dieu et de son amour. Et dans l’union conjugale l’homme et la femme réalisent cette vocation sous le signe de la réciprocité et d’une communion de vie pleine et définitive. Un couple marié est l’icône vivante et crédible de Dieu et de son amour ».

Dieu a pris cette initiative d’une alliance d’amour avec son peuple. Le Christ s’est donné totalement à son épouse, l’Eglise. Et c’est lui qui nous appelle, nous couples mariés, à être l’image de cet amour. C’est pourquoi un sacrement spécifique consacre et fortifie les époux. C’est ce si beau, si merveilleux sacrement du mariage.

Chacun de nous est appelé à vivre à son tour cette Transfiguration. Que notre regard s’illumine sous le regard amoureux de notre conjoint.

Si vous êtes là, c’est parce que vous avez vécu des transfigurations comme celle de l’Évangile d’aujourd’hui. Et si ce matin notre archevêque est venu partager quelques minutes de son précieux temps, s’il y a des prêtres, des religieuses, des diacres, des baptisés avec vous, c’est parce qu’ils ont été eux aussi brûlés par la beauté de certains passages de l’Écriture, ou de certains silences, ou de certains témoins. Si vous êtes ou allez être 2 époux et épouse, c’est parce qu’il y a eu dans votre histoire des éblouissements où l’amour de l’autre vous est apparu dans une telle beauté que toute votre vie en a basculé.

Et nous couples catholiques mariés, n’oublions jamais que, il y a un an, vingt-cinq ans ou cinquante ans lorsque nous nous sommes donnés complètement à notre conjoint, nous avons choisi d’être l’image rayonnante de l’amour du Christ.

Et vous qui dans quelques mois allez inviter le Christ à votre mariage, à votre tour vous deviendrez cette icône vivante. Notre société fait souvent croire qu’un couple qui dure est un couple « magique », un couple au top. Mais cette image est mauvaise. Car soit on reste dans la superficialité, soit on veut être un couple parfait et cela est inatteignable car vous l’avez appris : aimer c’est s’adapter, aimer c’est gérer l’imparfait. A moins d’écouter le Christ. Contre la culture de l’instant, les couples mariés par un engagement pour toujours, sont l’image de cet amour infini de Dieu. Alors, tous les jours de notre vie dans le mariage, redisons notre oui à celui ou à celle que Dieu nous a donné(e) à aimer. Recevons notre conjointe comme cadeau de Dieu. Soyons aimables c’est-à-dire capable d’aimer.

Gardons cette image de la Transfiguration. Les trois apôtres ont vu le visage de Jésus changer ; on peut se demander aussi si leur regard n’a pas changé. N’est-il pas vrai que de regarder un visage lumineux peut nous rendre aussi lumineux ? Alors regardez votre conjoint car quand on ne se regarde plus on finit par ne plus se voir !

Le Père appelle à écouter son Fils ; il nous invite à obéir à sa Parole, pour la vivre dans notre monde. Alors écoutez-vous car quand on ne s’écoute plus on finit par ne plus s’entendre.

Chaque jour Dieu nous parle ! Et entre vous qu’en est-il ? Alors parlez-vous car quand on ne se parle plus on finit par ne plus rien avoir à se dire.

Si nous sommes vraiment des images de l’amour de Dieu, nos vies pourront éclairer celles des autres. Et c’est là un de nos devoirs nous mariés catholiques. Ce qu’un couple fait ensemble peut, ou plutôt, doit être habité, transfiguré par leur amour. Je pense aux fiancés qui s’engagent ensemble dans des associations. Je pense aux 103 catéchumènes qui ont vécu leur appel dimanche dernier et que nous devons éclairer de notre amour. Je pense aux jeunes pour qui nous devons être des témoins d’amour transfigurés pour être configurés au Christ. Je pense à nos malades, nos aînés, à tous nos frères et sœurs, à toutes celles et ceux qui vivent actuellement la guerre envers qui nous devons être aimables c’est-à-dire capables d’aimer.

La transfiguration devient pour nous une occasion de voir une présence lumineuse dans un corps vieilli, un étranger, une personne abîmée par les souffrances de la vie et à qui nous redonnons une vie, une dignité, une joie.

Bien sûr, comme au désert, la route est parfois difficile, tortueuse. Mais ce n’est pas parce que la route est difficile que ce n’est pas la bonne route ! Il y a parfois des ornières, des impasses dans lesquelles nous nous égarons. Les religieuses durant votre parcours de préparation au sacrement de mariage vous ont rappelé cela. Alors rappelez-vous toujours qu’en vous mariant en Eglise, vous avez mis le Christ dans votre union. Écoutez ce que Jésus vous dit, écoutez ce qu’il vous apprend de son Père miséricordieux et plein d’amour.

Et c’est pour cela, que tous, mariés ou non, nous devons regarder avec joie et compassion le mariage. Nous devons nous engager pour lui, le défendre, surtout quand il est moqué, surtout quand il est blessé, quand il est perverti. Ne nous habituons pas aux mariages blessés, rompus. Ce qui ne veut pas dire de ne pas aider ces couples en crise, surtout pas. Nous devons accompagner avec tendresse ces couples. Nul n’a le droit de les juger, chacun a le devoir des les aimer, de les aider. Et c’est pour cela que toute notre communauté échangera avec vous autour du pot de l’amitié à la fin de cette messe. Chers fiancés, n’ayez pas peur, chacun des membres est aimable c’est-à-dire capable d’aimer.

Ensemble prions le Christ d’éclairer de son visage transfiguré, tous les couples. Ensemble prions le Christ d’éclairer tous les amoureux de la terre : qu’ils réalisent la grâce que Dieu leur donne. Ensemble prions le Christ de transfigurer nos amis fiancés qui terminent aujourd’hui leur préparation au sacrement du mariage mais ce n’est pas la fin. Non ce n’est que le début d’un long cheminement sur cette route de l’Amour infini.

Ensemble prions le Christ de transfigurer nos frères et sœurs qui vivent la guerre ainsi que leurs dirigeants. Ensemble prions le Christ de nous donner des vraies faces de Carême, Carême ou " Car-Aime" en 2 mots ! Bien plus qu'un jeu de mots, cette pirouette des lettres, ne nous fait-elle pas découvrir le sens de cette route sur laquelle tout simplement nous allons essayer d'aimer et de nous laisser aimer davantage. Cela commence dans les toutes petites choses faites avec un grand cœur !

Laissons-nous transfigurer par la joie d’être appelés par Dieu sur la route de Pâques, route sur laquelle je vous invite à méditer cette prière que vous pourriez dire ensemble, main dans la main, chaque soir avant de vous endormir. Nous ne sommes pas au lit mais chaque conjoint peut ici prendre la main de son ou sa bien aimé. Si vous êtes seul(e) joignez vos mains. Je vous invite à fermer les yeux et à ouvrir vos oreilles, écoutez cette prière :

Je veux faire route avec toi, Seigneur, c’est Toi que j’ai choisi

Je veux T’aimer et Te rester fidèle au long des jours.

Mais, accorde-moi de la patience, Seigneur, il me faut du temps pour répondre à Ton appel.

Pardonne mes faiblesses, Seigneur, pardonne aussi mon doute et mon infidélité.

Ce sont les signes de mon humanité.

Donne-moi le courage de Te suivre toujours, l’honnêteté pour adhérer à Tes paroles,

L’humilité pour accueillir mes frères, la force pour être fidèle à Ton enseignement.

Réveille en moi le désir d’accueillir, chaque jour, la lumière de Ton Évangile.

Écoute, Seigneur, le chant de ma prière.

Je veux faire route avec Toi, c’est Toi que j’ai choisi !

Je veux T’aimer et Te rester fidèle au long des jours

Amen

Article publié par Doyenné de Cambrai • Publié le Mercredi 16 mars 2022 • 629 visites

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